Dans son jugement du 14 janvier 2025, la Cour d’appel de Bruxelles a réaffirmé les normes strictes nécessaires pour établir la tromperie dans le contexte d’un transfert d’actions, en rejetant l’action pour la nullité intentée par la société de cession. Ce dernier a accusé les anciens actionnaires d’avoir caché des informations cruciales qui, à son avis, ont déformé son consentement lors de l’acquisition d’un groupe d’entreprises impliquées dans la vente de produits alimentaires.
Rappelons d’abord que, selon l’article 5.35, le paragraphe 1 du Code civil, la tromperie implique une conduite intentionnelle qui viate le consentement. Cette nature intentionnelle est essentielle: une erreur causée par la négligence ou l’approximation n’est pas suffisante. De plus, la tromperie n’est pas présumée et doit être prouvée.
La société transférée, assistée par des conseillers spécialisés, a accusé les vendeurs de manipuler les comptes pour gonfler artificiellement l’EBITDA et de ne pas divulguer délibérément les faits essentiels (tels que la perte de clients clés, les différends avec l’AFSCA, etc.), dans le but de distribuer le prix d’achat des actions. Il a affirmé avoir été induit en erreur, justifiant ainsi l’annulation de l’accord (en présence de la soi-disant tromperie «principale») ou, alternativement, une indemnité fondée sur la violation des garanties contractuelles (en présence d’une soi-disant tromperie «incidente»).
Cependant, dans cette affaire, la Cour d’appel de Bruxelles a conclu que la société d’acquérir n’avait pas prouvé de conduite frauduleuse. Le tribunal a souligné que les données financières, la performance des entreprises et les risques identifiés avaient été divulgués, analysés et discutés avant la transaction. Un processus de diligence raisonnable approfondi avait été mené, fournissant à l’acheteur toutes les informations nécessaires. L’interprétation rétrospective de l’acheteur des éléments déjà connue au moment de la vente était insuffisante pour établir la tromperie. Aucune dissimulation intentionnelle ou violation des garanties contractuelles n’a été prouvée.
Le tribunal a donc confirmé la décision de première instance, rejetant la demande d’annulation déposée par la société d’acquisition.
Ce jugement est conforme à la jurisprudence établie: la tromperie ne peut être maintenue que si des preuves précises, détaillées et cohérentes sont produites, en particulier lorsque l’acheteur est un professionnel expérimenté soutenu par des conseillers. Les juges n’interviennent pas pour compenser les erreurs de jugement ou les regrets, mais seulement pour sanctionner la tromperie prouvée.
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