Amnesty International a déclaré jeudi que les autorités du Salvador ont utilisé à mauvais escient le système de justice pénale et les récentes réformes juridiques pour réprimer les défenseurs des droits humains et faire taire les voix dissidentes, portant ainsi atteinte à l’État de droit dans le pays.
Ana Piquer, directrice d’Amnesty International pour les Amériques, a déclaré : « Au lieu de rendre la justice de manière impartiale, le système de justice pénale du Salvador est devenu une arme pour punir la dissidence et étouffer l’espace civique. »
L’organisation a noté que les autorités du pays ont mis en place un « appareil répressif » par le biais de procédures pénales et l’ont utilisé pour faire taire les militants des droits humains. C’est particulièrement le cas de l’état d’exception en vigueur depuis 2022. Selon Amnesty International, l’état d’exception a été utilisé à mauvais escient pour procéder à des détentions massives, imposer des durées de détention administrative disproportionnées et suspendre les garanties judiciaires sous couvert de légalité. En outre, les réformes pénales adoptées, telles que la dissimulation de l’identité des juges, l’application automatique de la détention provisoire et l’extension des mesures punitives aux mineurs, ont violé les normes internationales des droits de l’homme, notamment la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).
Amnesty International a également recensé des cas dans lesquels les autorités ont eu recours à de vagues classifications juridiques pour criminaliser des militants et des syndicalistes. Les victimes ont été détenues arbitrairement et ont fait l’objet de procédures judiciaires sans bénéficier du droit à une procédure régulière. Par exemple, trois avocats spécialisés dans les droits de l’homme ont fait l’objet de poursuites pénales en raison de leur militantisme. Amnesty International a en outre déclaré que les autorités ont illégalement étendu l’application de l’état d’exception et de ses mesures procédurales aux avocats accusés, y compris la suspension des garanties procédurales et des délais, alors qu’ils n’ont été accusés que de délits de droit commun sans rapport avec des bandes criminelles.
Les violations des droits humains se sont poursuivies dans les prisons du Salvador, où les détenus sont détenus dans des conditions de surpopulation, soumis à un isolement cellulaire prolongé, privés de soins médicaux en temps opportun et exposés au risque d’être torturés. Ces violations ont affecté non seulement la santé et le bien-être des détenus mais aussi ceux de leurs familles. Amnesty International a donc appelé les autorités salvadoriennes à libérer toutes les personnes détenues uniquement en raison de leur militantisme en faveur des droits humains et a exhorté la communauté internationale à intensifier son examen de l’utilisation abusive du système de justice pénale par les autorités.
La situation en matière de sécurité et de droits humains au Salvador a suscité des inquiétudes depuis que les autorités ont annoncé l’état d’urgence le 27 mars 2022, en réponse à une recrudescence de la violence des gangs. La répression des homicides liés aux gangs s’est traduite par des arrestations massives et la suspension des droits constitutionnels, ce qui a suscité les critiques des organisations de défense des droits humains. En outre, une série de réformes juridiques ont été critiquées par des groupes de défense des droits humains pour violation des droits de l’homme. Ces réformes comprenaient la modification du droit pénal autorisant les autorités à détenir des enfants de 12 ans dans des prisons pour adultes, ainsi que la « loi sur les agents étrangers » imposant des mesures administratives aux groupes bénéficiant de financements internationaux. Alors que les autorités salvadoriennes affirment que ces mesures étaient nécessaires pour préserver la souveraineté et rétablir la sécurité dans le pays, les organisations affirment qu’elles s’inscrivent dans le cadre d’une campagne plus large contre la dissidence politique.
























